Commentaire "dans quelle mesure le rire peut-il être gênant ?"

Dans quelle mesure le rire est-il nécessaire ?

 

 

Le rire est un phénomène naturel et incontrôlable que nous ne pouvons réellement maîtriser. Il fait partie de notre personnalité.  Mais dans quelle mesure peut-il devenir nécessaire ? Avant de répondre à cette question nous tenterons de définir le rire.

Le rire est un moyen de communication entre les êtres humains, il est un langage non verbal qui est compris de tous. Rose-Line BRASSET dans Coup de Pouce écrit en mai 2011 le qualifie de « stratégie de choix » et d’ « émotion joyeuse ». Il est irrépressible puisque naturel, BENABAR dans sa chanson «le fou rire » nous parle d’un fou rire irrépressible à un enterrement. Le rire est un moyen d’oublier un instant les contraintes, les ennuis, le stress, Delphine DELARUE dans « Thérapie du rire » nous parle de Clémentine DUNNE, une comédienne qui a monté des ateliers du rire pour déstresser des salariés ou aider les seniors. Le site France.pnl nous présente Patch Adams un médecin qui n’a jamais donné de tranquillisants à ses patients. Le rire peut aussi être une arme contre l’oppression, Primo LEVI dans « si c’était un homme » relativise par écrit les scènes horribles de la seconde guerre mondiale en contrant ainsi l’ignominie du comportement des nazis. Il en est de même pour Roberto BEGNINI dans « la vie est belle » qui campe un père cachant à son enfant, par diverses facéties, les réalités de l’enfermement en camp de concentration. Le rire peut également servir l’auto-dérision. La Bible relate l’histoire de Sarah et d’Abraham qui apprennent à l’âge de presque 100 ans qu’ils vont être parents. Sarah va alors se moquer de cette situation mais surtout d’elle-même. Le rire est aussi et avant tout un facteur de cohésion sociale. Il est fédérateur. Le petit Charles BOVARY dans l’œuvre de FLAUBERT,  en « fait d’ailleurs les frais » le premier jour de son arrivée dans sa nouvelle école. Sa tenue mais aussi son comportement vont éveiller chez ses camarades des envies de raillerie. Bien sur, selon BERGSON, le rire surgit chaque fois qu’une personne nous donne l’impression d’être une chose, c’est la transfiguration d’une personne en chose, cela nous ramène à l’analyse la plus complète du rire exercée par Georges MINOIS qui montre dans « histoire du rire et de la dérision » écrit en 2000 les fonctions accordées au rire qui évoluent selon les époques.

Le rire est-il alors nécessaire ? On est tenté de répondre oui puisque l’homme ne peut s’en passer, qu’il resurgit naturellement. Dans les temps les plus reculés alors qu’il était interdit par la religion, on ne pouvait quand même passer outre le rire. Le livre d’Umberto ECO « au nom de la Rose » le montre en développant autour une intrigue policière, Victor HUGO dans « Notre Dame de Paris » exhibe pour sa part,  un Quasimodo déguisé en pape des fous qui provoque les rires seulement autorisés cette journée là. D’un autre côté, bercé par l’étude, le jeune GARGANTUA explique à son père son invention « le torchecul » avec force de mots savants pour expliquer un propos que l’on peut qualifier de scatologique. La nécessité de faire passer des messages par le rire est facilement démontrée par le théâtre qui met en scène des situations de la vie grossies et déformées pour amuser. Molière a traité des défauts de l’être humain comme la misanthropie, l’avarice, le Dom Juanisme en créant des personnages caricaturaux. Sa force consistait à jouer ses pièces devant ceux qu’il avait caricaturés sans que ceux-ci s’en aperçoivent. De même le vaudeville au XIXe siècle soulignait par le rire des situations vécues dans la vie avec souffrance et tristesse comme l’adultère. Le fait d’en rire minimisait l’impact de ces travers. Germaine TILLON dans « le Verfügbar aux enfers » montre l’esprit de révolte et de combat des prisonnières du camp de Revensbrück. Claire Andrieu qui relate ce passage de l’histoire de la seconde guerre mondiale insiste sur le fait que ce récit fut écrit dans la plus parfaite clandestinité mais que pour Germaine TILLON il y avait nécessité de combattre l’ignominie et l’injustice de cet enfermement. Aujourd’hui les Guignols de l’Info sur Canal Plus caricaturent des personnages parfois immondes comme des dictateurs ce qui permet de se moquer d’eux et ainsi de les rendre moins effrayants. La nécessité de changer la valeur d’un message ou d’une opinion est enfin parfaitement caractérisée par le rire. Dany Boon dans « Bienvenue chez les Cht’is » montre des Gens du Nord sympathiques, accueillants et parfaitement normaux alors qu’on les imagine vivant dans la misère et presque déficients mentaux. En offrant des scènes caricaturales aux spectateurs le réalisateur et acteur a voulu transmettre un message nécessaire à ceux qui avaient besoin d’ouvrir les yeux sur leurs compatriotes.

 

On peut définir le rire de multiples façons, tantôt phénomène naturel, tantôt arme offensive contre l’injustice de la vie, il  est sans conteste un moyen de communication très performant. En témoignent les actions menées par les associations dans les hôpitaux pour faire rire les enfants atteints de maladies graves. Le temps que ces bénévoles consacrent à distraire les enfants est curateur et permet aux tout-petits de ne pas penser en permanence à ce mal qui les agresse et qui les empêche d’avoir une enfance « normale ».

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